JBMO 2013

La délégation française pour les JBMO (Junior Balkan Mathematical Olympiad) qui se dérouleront du 21 au 26 juin 2013 à  Antalya en Turquie, sera composée de :

 Vincent Bouis, en Seconde au lycée Lycée Hugues Capet (Senlis) ;

 Félix Breton, en Troisième au collège Collège Janson de Sailly (Paris) ;

 Adrien Lemercier, en Troisième au Collège Saint-Louis-de-Gonzague (Paris) ;

 Arthur Nebout, en Seconde au CNED ;

 Alexandre Thiault, en Troisième au Collège Fénelon (Lyon) ;

 Lucie Wang, en Troisième au Collège Sainte-Marie (Antony).

Igor Kortchemski sera chef de délégation, et Vincent Jugé le chef de délégation adjoint.

Pour plus d’informations, voir le site officiel.

JBMO : Jour 0 (Vendredi 21 juin)

En ce jour o๠débutait notre périple turc, Sarruma nous a été favorable et a permis à  l’équipe d’arriver sans encombre sur son lieu de villégiature – euh… de travail acharné : il a attendu notre arrivée à  l’aéroport Charles-de-Gaulle pour déposer en gare de Chà¢telet-les-Halles un colis abandonné ; limité à  même pas une heure le retard de notre avion pour l’escale prévue à  l’aéroport Atatà¼rk d’Istambul, o๠la compagnie Turkish Airlines l’a suppléé pour envoyer quelqu’un nous conduire directement de notre avion au terminal destiné aux vols intérieurs ; nous a permis de récupérer l’ensemble de nos bagages à  l’aéroport d’Antalya, malgré quelques frayeurs pour Adrien, qui a dà» attendre ses bagages cinq minutes après que tout le monde avait déjà  récupéré les siens.

C’est donc pleins d’enthousiasme que nous avons découvert Tansu, étudiante pour devenir professeur d’Anglais et notre guide pour tout le séjour, qui nous attendait à  la sortie de l’aéroport avec un grand sourire. Et, après un rapide transfert en bus, nous avons tous découvert l’hà´tel ou nous logerons pendant la semaine qui vient… Tous ? Enfin presque. En effet, Igor nous a quittés sità´t arrivé à  l’aéroport, pour se rendre dans l’hà´tel ou les chefs de délégation logeront jusqu’au matin de l’épreuve.

Dès notre arrivée à  l’hà´tel, nous avons alors confié nos documents d’identité aux organisateurs de la JBMO, et et qui devraient nous les rendre sous peu, accompagné des clés de nos chambres. A alors débuté une attente assez longue, ponctuée par la dégustation d’un jus de cerise si sucré qu’il donnait soif, la découverte de sacs JBMO remplis d’un polo, d’une casquette, d’un calepin ou encore d’une boîte de loukoums qui promettaient d’être excellents.
L’attente fut si longue que nous sommes finalement partis dîner sur la terrasse en plein air de l’hà´tel, dans une atmosphère à  la température si clémente que l’on en aurait presque oublié l’automne qui, en France, dure depuis septembre dernier. Là , on a eu l’occasion de découvrir que l’ensemble des membres de la délégation chypriote parlait français, et de goà»ter à  ce qui est à  n’en pas douter une spécialité culinaire locale — la pizza kebab !

Finalement, somme toute assez fatigués, nous sommes retournés dans le hall de l’hà´tel, o๠les organisateurs de la JBMO nous ont assez vite rendu nos passeports et les clés de nos chambres. C’est ainsi qu’Adrien, Alexandre et Arthur — de même que Félix et Vincent d’une part, Lucie et une participante chypriote d’autre part — se sont retrouvés dans la même chambre en tant que membres de la même famille et, sur le formulaire o๠on leur demandait quel lien de parenté les unissait, se sont tout simplement déclarés « amis » ! Alors, repus, assez fatigués par le voyage somme toute assez long depuis Paris, et enfin en possession des clés de nos chambres, nous avons décidé qu’il était grand temps de dormir ! Et de rêver à  la cérémonie d’ouverture qui nous attend demain…

JBMO : Jour 1 (Samedi 22 juin)

L’avenir appartient à  ceux qui se lèvent tà´t ; le Soleil de Turquie l’a manifestement compris, lui qui se réveille à  des heures indues pour baigner de sa douce lumière nos chambres d’hà´tel. Après un réveil matinal et un petit-déjeuner qui devrait donner à  certains la soudaine envie d’entamer un régime, nous avons été conviés à  la cérémonie d’ouverture, qui se tenait dans le centre de conférences de l’hà´tel.

Là , nous avons eu la chance de voir de loin les chefs de délégation et membres du jury, dont notre Igor national. Ils étaient arrivés avant nous et sont repartis après notre départ, et cinq ou six rangs de sièges laissés libres nous séparaient, ce afin d’éviter toute communication intempestive à  l’heure o๠il était déjà  dans le secret des Dieux et avait pris connaissance de la liste courte. Tout au plus pouvait-il nous saluer de la main, mais sans nous donner d’indication avec les doigts comme l’aurait fait Olivier Chiabodo.

Ont suivi de forts sympathiques discours de bienvenue en Anglais, un film nous invitant à  revenir en Turquie en d’autres occasions, et un mémorable spectacle de danses traditionnelles turques : pour avoir abandonné au bout de deux tours l’idée d’imiter les derviches tourneurs que nous avons alors vus, je ne peux qu’apprécier encore davantage la performance que nous avons pu voir.

Une fois la cérémonie terminée, nous avons finalement décidé de visiter la piscine intérieure et le jacuzzi de l’hà´tel. L’eau était délicieusement tiède, la température ambiante y aidant sans doute un peu. Cela dit, la Méditerranée elle-même n’est en fait pas beaucoup plus froide, comme nous avons pu le constater en fin d’après-midi : il nous faudra revenir périodiquement pour vérifier cette première impression.

Que dire d’autre de cette journée ? La séance de révisions mathématiques et de jeu de cartes, au sein de la salle de repos la mieux climatisée de l’hà´tel, a été intense. à€ l’heure o๠le soleil tapait à  38°C à  l’ombre — et sans doute beaucoup plus en réalité, vu la quasi-inexistence d’ombre entre deux et quatre heures de l’après-midi — il faisait bon garder la tête froide autour d’annales des anciennes JBMO.

Cette journée, agréable s’il en est, s’est finalement achevée sur le coup de 21 heures pour toute l’équipe, afin d’être frais et dispos pour la journée décisive qui s’annonce demain. Géométrie ? Arithmétique ? Combinatoire ? Inégalités ? L’avenir nous le dira…

Interlude: du cà´té des chef des délégations (par Igor Kortchemski)

Sità´t arrivés à  Antalya, je suis séparé du reste de l’équipe et je transféré en mini-bus dans un hà´tel différent des participants et chef de délégation adjoints. Les coordinateurs (les personnes du pays organisateur qui sont chargées de noter les copies, la plupart du temps des jeunes anciens participants aux olympiades) restent avec les chefs de délégation (et écoutent les discussions du jury, sans y participer). Nous arrivons vers 20h à  l’hà´tel: j’ai tout juste le temps de poser mes affaires après avoir récupéré la clé de ma chambre, mon badge, le sac à  dos contenant différents trésors (dont les fameux loukoums) et je me dirige vers le dîner d’ouverture auquel participent les chefs de délégation, les coordinateurs et les organisateurs. Le repas, composé de délicieuses spécialités culinaires turques, était délicieux, et accompagné d’une ambiance musicale de trois musiciens.

Le dîner se termine vers 22h30, et je réussis à  récupérer la fameuse shortlist de 18 problèmes. D’après le règlement des JBMO, la shortlist est établie par un comité formé par le pays organisateurs (4 ou 5 personnes) à  partir des propositions de problèmes d’autres pays, et doit contenir au moins 16 problèmes. La shortlist contient les énoncés et solutions, mais je décide de chercher les exercices pour essayer de me rendre compte de leur difficulté (une solution « facile » n’est pas forcément facile à  trouver!). Cette année, celle-ci contient 3 exercices d’algèbre (intitulés A1,A2,A3), 3 de combinatoire (C1,C2,C3), 6 de géométrie (de G1 à  G6) et 6 de théorie des nombres (de N1 à  N6). Je me couche vers 2h du matin, impatient de voir comment se ferra la sélection des problèmes.

Le lendemain matin est consacré à  la cérémonie d’ouverture, qui se déroule à  l’hà´tel des participants. Le trajet dure 1h30 (aller-retour), la cérémonie 30 minutes. Cependant, nous profitons du trajet en bus pour commencer à  discuter des exercices.

La première session du jury commence tout de suite à  notre retour; voici son compte rendu:

Début: 12h11
Le comité de sélection du problème commence par faire quelques remarques sur la shortlist. Les exercices A2, C1, C2 sont standard, mais ont été gardés pour avoir quand même un peu le choix. Cependant, le comité déconseille de les choisir. Par ailleurs, un exercice similaire à  A2 à  été posé aux olympiades turques récemment. A2 est ainsi éliminé immédiatement. Finalement, C1 et C2 sont standard (pas de référence précise).

Question d’un membre du jury: quels ont été les critères pour faire la shortlist?
Réponse: en combinatoire, on a tout mis. En algèbre, 5 exercices proposés en tout, et les 2 qui n’ont pas été choisis sont encore plus standard. En géométrie et théorie des nombres, on avait plus de problèmes. G5 et G6 sont bien. Les autres problèmes laissés de cà´té étaient encore plus faciles.

Azer Kerimov (organisateur en chef et chairman de la discussion) demande si d’autres exercices sont connus.
Je soulève le fait qu’un énoncé très similaire à  l’exercice C3 (don’t l’énoncé initial était: « All possible pairs of n apples are weighed and the results are given to us in an arbitrary order. Can we determine the weights of the apples if a. n=4, b. n=5, c. n=6 ? If yes, how? ») est sur Mathlinks (site très populaire parmi le monde olympique). Cependant, celui-ci est quand même un peu différent: il demande de montrer que si n n’est pas une puissance de 2, alors étant donné tous les résultats des pesées des pommes, il existe une unique configuration des poids qui donne ces résultats. Le jury discute un peu et on arrive au dilemme dilemmique suivant: choisit-on C1 ou C2, ultra standards? Ou bien on ne choisit aucun problème de combinatoire (ce qui serait une première)? Ou bien son garde C3?

Juste avant le vote, le leader bulgare intervient sur le fait que les énoncés des JBMO seront bien entendu diffusés dans le monde entier, et laisse entendre que le prestige des JBMO serait entaché si on choisissait C1 ou C2, très classiques.

Il s’ensuit un vote:

Motion: on continue la discussion concernant C3 après le repas: 6 pour, 5 contre.

Petite précision: n’importe qui peut soumettre une motion au vote, mais seuls les 11 pays membres balkaniques ont le droit de vote.

On passe ensuite aux problèmes de géométrie.
Un leader donne son avis:
G1 facile
G2: trop dur (pour une raison que nous tairons sous le sceau de la confidentialité)
G3: OK
G4: OK
G5: ne dit rien (inégalité trop grossière)
G6: deux parties: la deuxième est connue. Les coordinateurs demandent une référence, ce qu’on observateur serbe fournit.

G3: apparemment certains éléments sont bien connus (pas la solution en entier).

Vote: enlever G6, adopté quasi à  l’unanimité.
Ceci conclut la première session du jury à  13h

Reprise à  14h25
Vote: enlever G2. 9 pour.

Entre temps, pendant la pause déjeuner, les coordinateurs ont travaillé pour proposer une reformulation du problème C3 (sous forme de jeu entre Alice et Bob). Le coordinateur en chef nous dit qu’il faut attendre encore quelques minutes pour avoir la version alternative. Un des leader s’impatiente et veut proposer une motion pour éliminer tout de suite C3. Le coordinateur en chef insiste en disant que ça ne ferait pas de mal de voir cette version alternative, et la motion n’est heureusement finalement pas soumise au vote.

La version alternative, nommée C3*, posée sous forme de jeu, insiste davantage sur le fait que les poids initiaux des pommes doive entre donnée de manière explicite. Après discussions:

Vote: garder C3*. 9 pour.

On passe ensuite à  la discussion sur les problèmes de théorie des nombres.

Vote: enlever N2 (argument: il n’y a pas de solution, et pour les jeunes c’est mieux d’avoir un exercice « positif » qui ait des solutions). Adopté à  la quasi unanimité.

Vote: garder N3. 7 pour, adopté.

Il reste à  choisir les exercices d’algèbre et de géométrie. Le jury décide de choisir des couplages et de voter: à  chaque tour, les pays membres peuvent voter pour n’importe quel nombre de couplages, et le couplage qui a le moins de votes est éliminé. Les couplages suivants sont proposés:

A1 G3
A3 G1
A3 G4
A1 G3
A3 G3

Premier tour:
A1 G3 : 4 votes
A3 G1 : 5 votes
A3 G4 : 3 votes
A1 G4 : 2 votes
A3 G3 : 8 votes

Conclusion : A1 G4 enlevé

Deuxième tour:

A1 G3 : 5
A3 G1 : 4
A3 G4 : 3
A3 G3 : 7

Conclusion : A3 G4 enlevé

Troisième tour:

A1 G3 : 6
A3 G1 : 5
A3 G3 : 7

Conclusion : A3 G1 enlevé

Quatrième tour:

A1 G3 : 4
A3 G3 : 7

Conclusion: A3 G3 choisis

Ainsi, les problèmes choisis sont : A3, C3*, G3, N3.

L’ordre des problèmes ne suscite pas beaucoup de débats:

Pb 1: N3
Pb 2: G3
Pb 3: A3
Pb 4: C3*

Il faut ensuite reformuler les problèmes en anglais en vue de l’épreuve. Un sous-comité, constitué des chefs de délégation de la Grèce, des Etats-Unis, d’un coordinateur et moi-même est créé. Nous passons au moins une heure pour essayer de formuler l’exercice 4 (C3*) de la manière la plus claire possible.

La session du jury reprend à  17h40 pour voter la version angaise.

Pour le pb 2, un pays suggère qu’il faudrait dire tout de suite que D est le pied de la hauteur, et ajoute que le résultat est aussi vrai pour n’importe quel triangle. Un autre pays propose d’ajouter la condition AB inférieur à  AC pour ne pas que les étudiants perdent du temps à  vérifier d’autres configurations.

Vote: ajouter AB inférieur à  AC. Accepté à  la majorité.

Vote concernant la version anglaise du problème 4: remplacer le coefficient binomial dans l’énoncé 2 parmi n par n(n-1)/2, enlever arbitrary order. Accepté à  l’unanimité.

Fin de la session du jury à  18h15. Il faut maintenant traduire le sujet dans les différentes langues. Il est prévu de se réunir à  21h pour voter l’acceptation des traductions, puis le vote des barèmes (sur lesquels les coordinateurs travaillent dès que les problèmes choisis sont connus)

à€ 21h, certains pays ne viennent que de commencer leur traduction… et finissent vers 23h. On reprend donc à  23h. Les traductions sont acceptées à  l’unanimité.

Vient ensuite sur la discussion des barèmes proposés par les coordinateurs. Les discussions portent sur deux exercices: pour une solution de l’exercice 4, j’interviens sur le fait que d’après le barème, traiter uniquement le cas ab=1 rapporte 7 points, ce qu’on modifie. On passe ensuite pas mal de temps pour se mettre d’accord sur le nombre de points à  accorder à  quelqu’un qui prouve l’unicité dans le problème 4, sans dire comment trouver la solution de manière explicite. Cette longue journée de discussions se finit un peu avant minuit.

Globalement, les discussions étaient constructives dans une ambiance amicale, même s’il y a eu quelques moments un peu tendus (en particulier lorsqu’un chef de délégation m’a interpellé en disant qu’il fallait que je me taise parce que je ne représentais pas un pays balkanique).

Le lendemain matin, journée d’épreuve, le jury se réunit une heure, pendant laquelle les élèves peuvent leur poser des questions sur le sujet. La question la plus intéressante était « Dois-je écrire avec un crayon à  papier ou un stylo? » (ce à  quoi nous voulions répondre « Oui »). Nous avons ensuite deux heures de temps libre, o๠je sors pour la première de l’hà´tel pour partir en exploration à  la piscine et à  la plage. Après le repas, nous rejoignons l’hà´tel des participants et chefs de délégation adjoints.

JBMO : Jour 2 (Dimanche 23 juin)

La journée et la relecture des copies a été longue. Pour nos chers élèves tout d’abord. Un réveil aux aurores ou presque (RDV à  7 h 30 pour le petit-déjeuner), un appel à  8 h 20 dans le hall de l’hà´tel o๠l’on apprend que trousses et sacs sont interdits dans la salle (y compris dans un coin de la salle o๠on les aurait laissés). Chacun s’empresse donc de prendre toutes ses affaires entre ses mains, avant de se diriger vers la la salle d’examen ! Heureusement, Laurent Thiault est là  pour récupérer les sacs et les emmener dans sa chambre, pendant que je discute avec les candidats pour diminuer le stress et que Tansu est aux aguets pour ne pas nous faire manquer l’entrée dans la salle d’examen.

Une longue attente plus tard — heureusement occupée par la découverte du sauna et du hammam — Igor me transmet une copie des énoncés. Résultat des courses :
1. un exercice d’arithmétique à  l’allure gentillette ;
2. un exercice de géométrie o๠l’on a tenté de cacher une hauteur ;
3. une inégalité que l’on pouvait résoudre à  l’aide d’un Cauchy-Schwarz astucieux ou de l’inégalité arithmético-géométrique ;
4. un problème de théorie des jeux scindé en trois sous-questions, de difficultés variables.
Je regarde donc les problèmes pendant l’heure qu’il me reste avant de retrouver mes ouailles, et tente d’identifier des idées naturelles que chacun aura pu avoir — ou pas — ainsi que les pièges et difficultés que recelait chaque problème.

à€ 13 h 30, enfin, la compétition est terminée. Les élèves sortent de la salle colonne par colonne, et je leur demande leurs premières impressions à  chaud. Chacun dit avoir fait des exercices différents : 1 pour Lucie, 2 et 3 pour Vincent, 1 et 3 pour Félix, 1 et 2 pour Adrien, 1 et 4 pour Arthur, et 2, 3, 4 pour Alexandre. La pression retombe, et les élèves, Lucie en tête, sont manifestement moins stressés que la veille. Après le déjeuner, nous sommes rapidement rejoints par Igor, qui est arrivé à  l’hà´tel avec tous les membres du jury, et nous partons pour l’aquapark, la piscine de l’hà´tel qui compte quatre toboggans à  eau (à  ne pas confondre avec la piscine interne, la piscine de 50 mètres ni la piscine à  vagues). Chacun affiche un large sourire, et tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Cette période de joie et d’allégresse ne pouvait cependant pas durer et, en sortant de la piscine, Arthur glisse et se fait mal au pied. Les maîtres-nageurs accourent, puis un employé l’emmène voir le médecin de l’hà´tel. Arthur se retrouve finalement à  l’hà´pital, aux cà´tés d’Igor et de Tansu, pour y effectuer une radio du pied. Le verdict est sans appel : il n’a aucun dommage osseux ! C’est donc un Arthur tout aussi souriant qu’à  son habitude qui est rentré à  l’hà´tel sur le coup de 19 h 30, alors que ses camarades lui adressaient leurs pensées depuis la plage et le jacuzzi o๠ils se prélassaient.

Enfin, juste après le dîner, Igor et moi-même recevons les copies de nos élèves, et entamons une longue nuit de plaisirs mathématiques, à  cà´té de nos élèves qui ont décidé d’améliorer leur maîtrise de la théorie des jeux en s’entraînant au loup-garou et au Mao. Profitant de la naà¯veté et de la générosité d’Igor, je propose de lire les copies des exercices 1 et 4 alors que lui regardera les exercices 2 et 3.

Comme prévu, les solutions proposées aux exercices d’arithmétique et de combinatoire collent beaucoup mieux au barème officiel que les solutions au problème de géométrie. Les solutions, mêmes partielles, sont claires, et mes problèmes sont donc très faciles à  relire et à  corriger. Au contraire, Igor doit se creuser la cervelle pour voir comment compléter les solutions partielles et voir en quoi elles sont similaires aux solutions « officielles », afin de voir combien de points elles méritent. J’entame donc l’exercice 3 avant même qu’Igor n’en ait terminé avec l’exercice 2, et bénis Mathematica de m’aider à  vérifier les calculs parfois horribles mais toujours justes que je rencontre : l’utilisation des ordinateurs est un des avantages fort appréciables de la situation de chef de délégation, en regard de celle des élèves, qui ont de toute évidence beaucoup plus de courage et d’opinià¢treté que moi ! Aux alentours de trois heures du matin, nous avons des arguments solidement étayés et une idée précise des points litigieux que nous comptons défendre, et partons donc nous coucher : il faut être d’attaque le lendemain pour que le travail de l’équipe soit évalué à  sa juste valeur !

JBMO : Jour 3 (Lundi 24 juin)

La nuit fut courte et difficile : quelle lourde charge que de devoir défendre les résultats que nos étudiants ont obtenus avec tant d’efforts ! C’est donc particulièrement stressé que je rejoins Igor pour un petit-déjeuner d’échauffement. La coordination — c’est le nom que l’on donne à  ce processus o๠l’on fixe les notes des élèves — doit se dérouler comme suit :
– Problème 3 à  9 h ;
– Problème 2 à  10 h ;
– Problème 1 à  11 h ;
– Problème 4 à  14 h.
à€ chaque fois, 30 minutes nous sont allouées. Nous commençons par donner les notes que nous estimons devoir donner à  l’élève ; les coordinateurs valident les notes sur lesquelles ils sont d’accord et nous demandent, dans les autres cas, de justifier la note que nous entendons obtenir. S’ensuit une discussion, qui aboutit à  l’attribution d’une note finale, que l’on écrit sur deux feuilles signées à  la fois par le chef de délégation et par l’un des deux coordinateurs.

Nous répétons une dernière fois les arguments que nous comptons invoquer pour le problème 3 : ils sont solides. C’est donc relativement confiants que nous allons vers la salle o๠se tiendra la coordination, et o๠les élèves ont composé hier. Là , Azer, l’organisateur en chef de la JBMO, nous apprend que plusieurs de nos élèves ont laissé sur leur table (sans les insérer dans une des pochettes dévolues à  cet effet) des documents avec des inscriptions mathématiques dessus, et nous confie ceux-ci après les avoir photocopiés. Résultat des courses : 3 points ont bien failli partir à  la poubelle !

La coordination se passe globalement très bien. Sur les quelques copies o๠nous sommes en désaccord avec les coordinateurs, nous expliquons en détail les raisons pour lesquelles nous pensons que notre élève mérite tant ou tant de points. On arrive systématiquement à  un accord rapide sur le contenu mathématique des copies, et dans deux ou trois cas il nous a encore fallu parlementer cinq ou dix minutes pour décider de la note dont ce contenu était digne. Il nous était alloué une demi-heure de discussion pour chaque problème, mais l’esprit conciliant et la bonne volonté qui règnent de part et d’autre favorisent des discussions fructueuses et efficaces, et nous avons même l’opportunité de passer à  10 h 30 sur le problème 1, au lieu de devoir attendre jusqu’à  11 h.

Lors de la coordination du problème 3, nous avons repéré, souvent dans les brouillons, des débuts de solutions qui nous permettaient d’obtenir 1 ou 2 points. Le 10/10 de Félix est clair. La seule copie susceptible de poser un problème est celle de Vincent, dont le raisonnement est excellent mais qui, à  cause d’une petite erreur à  la fin, n’aboutit en fait pas. Reste alors à  évaluer la valeur du dernier résultat correct qu’il a obtenu, et qui ne figure en fait dans aucune solution officielle, donc dans aucun barème. Nous avons repéré une solution qui ressemble à  celle de Vincent, et o๠l’inégalité à  la fin est aussi difficile à  prouver que celle à  laquelle il se ramène. Cependant, les coordinateurs soulignent que les techniques qu’il a utilisées sont également à  même de prouver l’inégalité en question, et qu’il est donc impossible de se rattacher à  un barème existant. Alors que nous pensions initialement obtenir 4 points de cette solution, nous repartons finalement avec 6 points et le sourire aux lèvres.

Puis vient le problème 2. De même, les points à  obtenir sont assez clairs pour Lucie, Adrien et Alexandre. Félix et Arthur ont formulé des résultats vrais mais qu’ils ne prouvent pas, et nous demandons donc la moitié des points qu’auraient pu apportés ces résultats une fois prouvés ; le jury considère que l’assertion d’Arthur est clairement vraie, et puisque Arthur a indiqué comment il avait voulu procéder — mais, écrit-il, sans avoir le temps de le rédiger sur la copie — il repart avec 2 points sur 2 pour avoir trouvé l’angle droit camouflé dans le problème et esquissé une chasse aux angles.
Enfin, la copie de Vincent est une solution partiellement analytique, mais o๠il a fait une erreur, puis qu’il n’a pas terminée, faute de temps. On demande 8 points, car il avait parfaitement compris la démarche à  suivre, et s’était effectivement placé dans un repère qui simplifiait énormément les calculs, tout en sachant que c’est a priori trop. Cependant, comme souvent dans les diverses Olympiades, les coordinateurs notent les solutions analytiques de manière extrêmement sévère, et lui accordent 4 points. Après une à¢pre discussion de plus de dix minutes, et en soulignant que Vincent a effectivement calculé l’équation de la médiatrice de [BC], nous nous mettons d’accord sur la note de 5/10.

Alors que nous nous apprêtons à  quitter la salle, l’un de coordinateurs du problème 1 nous hèle : la coordination sur ce problème va très vite, il est largement en avance sur les horaires prévus, et vu comme c’est parti il pourrait en avoir terminé vers 11 h. Après que nous avons annoncé les notes que nous désirions, seules les copies de Vincent et d’Adrien nécessitent discussion. Tout d’abord, la copie de Vincent ne rentre pas dans le barème officiel. Il a tenté de simplifier l’expression a^3 b+1 avec une division par a+1 mais son calcul n’a pas abouti, et effectue une telle division par a-1 — qui n’a cependant aucune raison de diviser a^3 b+1, comme il le note explicitement. Nous souhaitons donc 1 point : il a eu la bonne idée mais elle n’a pas abouti, ce qui aurait valu 3 points. Cependant, les coordinateurs refusent de donner de points intermédiaires, et ont déjà  donné plusieurs zéros à  des copies similaires. Respectant l’équité et acceptant ce zéro, nous expliquons en quoi la copie d’Adrien colle exactement au barème, et les coordinateurs tombent tout de suite d’accord avec nous, ce qui clà´t la coordination du problème 1.

Après un passage par la piscine et le restaurant pour profiter de ces moments privilégiés avec notre équipe, nous réattaquons le problème 4 sur le coup de 14 h, comme prévu. Le problème 4 avait en fait un piège caché : on demandait si Béatrice disposait d’une procédure explicite de calcul des nombres choisis par Alexandra, et pas seulement l’unicité des nombres d’Alexandra en fonction de leurs sommes prises 2 à  2. Du coup, beaucoup de solutions paraissent fausses ou douteuses, et nous avons dà» discuter les notes de toutes les copies à  part celle d’Adrien. Cependant, pour notre chance, nous avions exactement prévu l’interprétation que les coordinateurs avaient faites des copies de nos élèves, et nous avons donc systématiquement pu leur montrer en quoi nous avions en fait raison.
Pour commencer, Lucie avait explicitement choisi de prouver, justement, l’unicité des nombres d’Alexandra. Cependant, elle y parvient en calculant ces nombres, de sorte que les coordinateurs comprennent rapidement qu’elle mérite 3 et non pas 1.
Puis vient la copie de Vincent : il récupère 1 point grà¢ce à  une égalité marqué sur une copie qu’il n’avait pas rendue. De même, Félix passe de 5 à  7 grà¢ce à  2 points que j’ai trouvés sur une copie qu’il n’avait pas rendue. Suit la copie d’Arthur, qui mérite 6 points pour n’avoir montré que l’unicité des nombres d’Alexandra. Cependant, comme prévu, les examinateurs ne sont pas convaincus par un passage o๠il dit qu’il est « assez facile » d’identifier certaines sommes partielles, sans détailler ce passage plus que cela. Charge à  nous de montrer les indices qui, sur son brouillon, laissent penser qu’il a considéré ce passage comme si facile qu’il n’a pas développé plus que cela. Convaincre les coordinateurs nous a pris cinq bonnes minutes, soit deux ou trois fois moins que le temps qu’il m’a fallu pour trouver moi-même comment effectuer ladite identification — qui, cependant, et quand on s’y prend bien, tombe en effet tout naturellement.
Enfin, suite à  une modification du barème, la note d’Alexandre passe de 6 à  7/10.
Au total, la France a donc largement réussi ce exercice 4 (mieux que l’exercice 3) au point d’avoir obtenu le deuxième meilleur score cumulé sur cet exercice, avec 24 points ! Seuls les Etats-Unis ont eu mieux, avec 25 points. C’est donc fort heureux du succès de nos élèves qu’Igor et moi les rejoignons dans le hall de l’hà´tel.

Là , nous leurs donnons leurs notes, puis prenons le temps d’expliquer à  chacun le pourquoi de ses notes, les quelques maladresses qu’il a parfois commises, les qualités que nous avons été heureux de trouver dans ses copies — et elles étaient nombreuses ! — et lui prodiguons quelques conseils pour la suite de son apprentissage de mathématiques. Le conseil récurrent étant de s’entraîner et de se faire plaisir en faisant des mathématiques : plus on s’entraîne, plus on acquiert de réflexes, et plus on prend de plaisir, ce qui nous pousse à  plus nous entraîner… Puis le groupe s’est séparé pour vaquer à  ses activités : écriture du journal de bord pour les uns, farniente et piscine ou plage pour les autres, malgré le temps un temps exécrable par rapport au reste du séjour puisque légèrement nuageux — comme en atteste la photographie ci-dessous :

Enfin, durant la soirée, a lieu la réunion du jury, o๠ont été décidées les barres. Aux JBMO, seuls les pays Balkaniques ont un droit de vote, même si tous les chefs de délégation et leurs adjoints ont le droit d’émettre des commentaires. Après quelques discussions, les barres sont votées :
Or à  33 points
Argent à  26 points
Bronze à  14 points

Les résultats définitifs de l’équipe de France sont donc les suivants :

Candidat Exo 1 Exo 2 Exo 3 Exo 4 Total
Lucie Wang 10 2 1 3 16
Vincent Bouis 0 5 6 1 12
Félix Breton 10 3 10 7 30
Adrien Lemercier 7 10 1 0 18
Arthur Nebout 10 2 2 6 20
Alexandre Thiault 0 10 1 7 18
Total 37 32 21 24 114

JBMO : Jour 4 (Mardi 25 juin)

Ce matin, les chefs de délégation étaient conviés à  une visite du musée archéologique d’Antalya ainsi qu’à  un moment de flà¢nerie dans le centre-ville. Il nous a ainsi été donné l’occasion de découvrir de fort belles statues antiques et tenues utilisées jadis, puis d’acheter après force négociations des soieries et autres vêtements à  fière allure. Je comprends maintenant que le talent apparemment naturel d’Igor pendant la phase de coordination est en fait dà» à  des heures d’entraînement dans les souks et bazars qu’il a visités lors de ses multiples séjours touristiques. En outre, j’apprécie d’autant plus l’intégrité intellectuelle — certes attendue — des coordinateurs, après avoir assisté à  des dialogues surréalistes du type :

 » – 40 lires turques, c’est le minimum auquel je peux vendre cette étoffe ! En-dessous, je le vendrais à  perte.
– J’ai un budget de 30 lires, désolé, je m’en vais.
– Attendez, parce que vous êtes sympathiques, je vous le fais à  30 lires…  »

Puis nous rentrons à  l’hà´tel, o๠nous rencontrons nos élèves, qui semblent satisfaits de leur matinée passée entre les toboggans et la piscine. Un jacuzzi plus tard, nous voilà  à  la cérémonie de clà´ture, o๠l’on remercie les organisateurs puis o๠les élèves reçoivent leur médaille sur l’estrade. S’ensuit la traditionnelle séance de photographie d’équipes.

On patiente encore un peu en sirotant des cocktails — sans alcool, qui est de toute façon interdit aux moins de 18 ans en Turquie — puis on monte dans les bus qui nous accompagneront à  une des marinas d’Antalya. Là , nous distinguons un bateau à  voiles à  l’apparence inspirée de Pirates des Caraà¯bes, et espérons très fort que nous y passerons la soirée. Que nenni ! Nous embarquons sur le bateau voisin, un yacht tout de même assez grand pour abriter les 200 personnes que nous sommes.

Igor nous apprend un jeu russe o๠le but est simplement « de ne pas perdre ». Nous sommes sur le pont supérieur du bateau, la vue est très sympathique, et on dîne tranquillement. Puis la soirée musicale commence. Cependant, elle devient rapidement trop bruyante au goà»t de beaucoup — tout le monde sauf Igor et Tansu, en fait. Heureusement, la qualité musicale des interprètes est largement supérieure à  celle des chanteurs lors du karaoké de lundi soir !

Je trouve finalement une salle fraîche et à  l’excellente isolation phonique sur le pont inférieur. Certes, la vue n’est pas excellente, mais nous avons de toute façon prévu d’entamer une partie de Dame de Pique que nous n’aurons pas le temps de terminer — c’est trop bête, moi et Adrien étions en train de gagner…

Et c’est une fois de plus assez fatigués — sauf Lucie qui a fait la grasse matinée ce matin — que nous rentrons à  l’hà´tel. Après quelques minutes passées à  bavarder mathématiques dans un bar de l’hà´tel, je file me coucher : c’est que demain après-midi, je retourne au travail !

JBMO : Jour 5 (Mercredi 26 juin)

Aujourd’hui, tout le monde est tristounet, car il faut déjà  partir et retrouver la grisaille qui nous attend à  Orly. Les bus pour l’aéroport quittent l’hà´tel à  9 h 30 : il ne faut donc pas traîner. Dès 8 h, toute l’équipe se retrouve au petit-déjeuner. Toute ? Non. Seule une irréductible gauloise résiste encore et toujours à  l’envahisseur. C’est ainsi que je prends mon petit-déjeuner aussi vite que possible, puis que je file tambouriner à  cÅ“ur joie sur la porte de Lucie. Elle ne se réveillera cependant que peu avant 9 h, après que j’aurai fini de faire mes valises et que je serai revenu frapper une deuxième fois à  sa porte.

Nous sommes finalement tous prêts à  partir. Nous avons un peu peur car le minibus 14 places qui nous accueille est censé abriter les délégations Française et Roumaine. Heureusement, on a de la chance, nous rentrons tous dans le véhicule et nos bagages aussi — et rassurez-vous, les Roumains sont également rentrés à  bon aéroport. Quelques contrà´les de sécurité plus tard, nous voilà  dans l’avion. Contre toute attente, le vol low-cost Transavia nous propose gratuitement un déjeuner, que nous avalons tous avec joie.

Et c’est finalement à  peu près à  l’heure — pour une fois — que l’avion arrive à  Orly. La suite, vous la connaissez… En tout cas, deux choses sont sures :

1. J’ai passé un excellent séjour à  Antalya, et je vous remercie tous pour cette semaine fantastique que vous m’avez donné de vivre.

2. Les EGMO (European Girls’ Mathematical Olympiad) ont lieu l’an prochain à  Antalya : à  votre place, mesdemoiselles, je commencerais d’ores et déjà  à  travailler mes mathématiques, le jeu en vaut clairement la chandelle !

Quelques citations mémorables… Aidez-moi à  en retrouver d’autres !

Vincent J. : Vous verrez, pour faire des maths dans un endroit aussi paradisiaque, il faut vraiment une sacrée force de caractère !

Félix (à  propos de son troisième prénom) : Qu’est-ce-qu’il y a de plus stupide, comme nom, que Camille ?
Vincent J. : Félix !

Arthur : J’ai fait les problèmes 1 et 4.
Vincent J. : Au problème 4, tu as trouvé quoi ?
Arthur : Alors, dans les deux premiers cas…
Vincent J. : OK, c’est bon !

Arthur (après s’être fait mal au pied en tombant) : Faut voir le cà´té positif, j’aurais pu me casser le dos…

Quelqu’un : C’est quoi, ce cocktail ?
Vincent J. : C’est un virgin mary : un bloody mary sans vodka.
Quelqu’un : Et c’est quoi, un bloody mary ?
Laurent : C’est un virgin mary avec de la vodka.

Vincent J. : Si ça peut te rassurer, Arthur, j’étais aussi tête-en-l’air que toi quand j’avais ton à¢ge…
Laurent : Je trouve que ça fait plutà´t peur…

— Vincent Jugé, Chef de délégation adjoint

OIM 2014 : En route pour Le Cap (jour 1)

Aprés avoir bénéficié du soutien d’illustres collègues , l’équipe de France s’est embarquée pour Le Cap, via Johannesburg, en Afrique du Sud.

Si le périple en RER fut rapide et sans anecdote notable, nous eà»mes heureusement la joie d’apprendre dés l’enregistrement des bagages que notre escale à  Johannesburg ne serait pas de tout repos : elle ne l’a pas été. En effet, les règles en usage en Afrique du Sud étant trés astucieuses, nous avons eu 1 h 30 (en fait un peu plus, car le vol pour Le Cap est parti en retard) pour :

  1. passer le contrà´le d’identité à  la frontière sud-africaine (n’oubliez pas d’enlever vos lunettes lors du contrà´le !) ;
  2. récupérer nos bagages ;
  3. passer à  la douane (en zone « Rien à  déclarer », bien sà»r) ;
  4. réenregistrer nos bagages ;
  5. suivre l’employé de South African Airlines qui nous avait été envoyé pour trouver au plus vite le terminal d’embarquement, et ce avant même d’avoir terminé l’étape 4 ;
  6. subir un nouveau contrà´le des bagages à  main ;
  7. embarquer effectivement.

Si les étapes 6 et 7 n’avaient rien de surprenant pour une escale, le fait de devoir récupérer nos bagages pour les réenregistrer aussità´t (enfin… 10 minutes plus tard) sans rien en faire entre deux en a surpris plus d’un.

Et c’est justement dans la précipitation de l’étape 4 que la compagnie South African Airlines a acheminé la valise d’Adrien vers le mauvais vol Johannesburg – Le Cap. à€ l’arrivée, il a donc eu la chance de voyager léger ; heureusement, les systèmes d’information de la compagnie aérienne sont trés bien faits, et nous avons donc appris trés vite que la valise avait mal acheminée mais non pas perdue ! D’ailleurs, Adrien s’est montré trés heureux quand on la lui a rapportée ce soir, au moment o๠il montait vers sa chambre avec son oreiller pour objectif n°1.

Nous avons finalement dit au revoir à  Pierre, qui, avec un peu de chance, éprouve déjà  l’exaltation immense de lire en avant-première une multitude d’exercices de la « short list ». L’hà´tel Once in Cape Town , o๠nous résidons désormais pour trois jours, nous avait dépéché un minibus, et nous sommes donc arrivés tranquillement au Cap.

La ville est tout en collines verdoyantes au bord de la mer, la vue depuis la route que l’on suivait depuis l’aéroport nous offrant un panorama magnifique. Je n’ai pas eu le réflexe de sortir mon appareil photographique à  ce moment-là , et vous devrez donc vous contenter de cette colline dont le sommet est perdu dans les nuages…


Quelques récréations mathématiques et pizzas plus tard, nous voilà  tous sur le point de nous coucher : si, à  l’instar de nos camarades footballeurs, l’équateur a été pour nous un obstacle vite oublié, la nuit en avion n’a pas été des plus réparatrices…

à€ demain , dés 8 h 30, pour un petit-déjeuner qui nous aura redonné la force de poursuivre nos aventures !

OIM 2014 : Les maths, c’est l’éclate (jour 2)

Aprés un voyage riche en émotions , l’équipe de France s’est donc attelée sérieusement à  l’ouvrage : 7 h de maths (au moins) dans la journée, rien de tel pour être en forme !

La journée a donc débuté dés 8 h 30 (voire 8 h 35 pour certaines) avec un petit-déjeuner des plus sympathiques, en terrasse : et oui, on n’a pas peur de la fraîcheur matinale, surtout quand il n’y a pas de table assez grande à  l’intérieur et qu’on a des habits chauds !

La matinée s’est poursuivie de manière festive, chacun travaillant sur un exercice de son choix (essentiellement de l’arithmétique et de la géométrie ). Puis, sur le coup de 11 heures, un petit cours, fait de rappels et de nouveautés, sur les liens qui lient polynà´mes, algèbre linéaire et arithmétique.

Aprés le réconfort physique d’un doux repas o๠certains ont innové (et surtout eu peur de devoir faire la vaisselle, puisque des verres étaient à  notre disposition), on est passé aux choses sérieuses : un entraînement de 4 h 30 avec 4 exercices de difficultés inconnues, tous issus de « short lists » (listes parmi lesquelles on choisit les problèmes effectivement donnés lors de l’OIM).
Chacun des quatre grands domaines de l’olympiade était représenté : algèbre , arithmétique , combinatoire et géométrie .

Force est de constater que, aprés 4 h de travail, la fatigue accumulée depuis le matin se faisait nettement sentir : on ne ressort pas de 7 heures de réflexion intensive sans avoir besoin de repos ! La séance s’est donc terminée par une explication des méthodes utilisées pour résoudre chacun des problèmes, en mettant l’accent sur les raisons naturelles qui peuvent pousser un éléve à  s’orienter vers telle ou telle solution.

Il était alors temps de mettre toutes ces méninges au repos, et une bonne séance devant la TV, o๠était retransmis le match entre la France et l’Allemagne, était donc particulièrement indiquée. Conclusion : heureusement qu’il nous reste des matheux pour ramener des médailles en France ! Et pour cela, rien de tel que de continuer l’entraînement

PS : félicitations à  Elie et à  Moà¯se pour leur brillant succés au baccalauréat ! 18 de moyenne, c’était manifestement trop peu pour eux…

PS n°2 (rajouté quelques jours plus tard) : félicitations à  Antoine Dupuis, membre de l’OFM depuis trois ans et membre de l’équipe de Belgique, qui a réussi le tour de force de dépasser les 20 de moyenne !

OIM 2014 : Travailler les listes courtes, c’est long (jour 3)

Aprés une journée mathématique intense , l’équipe de France a une nouvelle fois passé le plus clair de son temps à  s’exercer sur des annales, issues des désormais fameuses listes courtes. La matinée était consacrée à  trois heures de travail sur des problèmes de géo mét rie et de combi natoire .

Aprés tant de délices, tout le monde était donc ravi de recommencer avec une séance de 3 heures entre 1 h 30 et 4 h 30. Il faut dire que les dieux de la pluie étaient avec nous, et ont parfaitement réussi leur mission de nous pousser à  faire des mathématiques plutà´t qu’une balade touristique en plein air ; souhaitons que l’Afrique du Sud justifie bientà´t son statut de « Nation arc-en-ciel » en nous offrant un soleil généreux…

Comme hier, chacun a donc eu la joie de regarder des problèmes d’arithmétique , d’algèbre , de combinatoire et de géométrie .

Aprés quelques explications complémentaires là  o๠c’était nécessaire, la réflexion mathématique a laissé la place à  la réflexion maoiste , puis encore à  d’autres jeux de cartes, et enfin à  la réflexion gustative : pizza hawaà¯enne ou quatre fromages ?

C’est impatients de connaître la réponse à  cette dernière question que je vous laisse, en attendant le début officiel de la 55ème Olympiade Internationale de Mathématiques !

OIM 2014 : Les choses commencent vraiment ! (jour 4)

Après deux jours et demi d’entraînement , l’équipe de France a enfin débarqué à  l’université du Cap pour le début officiel de l’Olympiade Internationale de Mathématiques. Enfin, a débarqué… le transfert ne fut pas de tout repos.

Le matin même, on m’a informé que le RDV était fixé au Jameson Hall . Saint Google Maps ayant indiqué qu’il suffisait d’aller à  la gare centrale du Cap (15 minutes à  pied) puis de prendre le train pour 5 stations et de marcher 200 mètres pour arriver à  l’université, le voyage promettait donc d’être simple, rapide et efficace.

Que nenni ! L’université est située à  flanc de montagne et divisée en 3 campus : le campus bas est bien à  200 mètres de la gare, mais le Jameson Hall se situe 1 km plus loin (900 mètres en longueur et 100 mètres en altitude… dans de tels cas, le théorème de Pythagore ne s’applique pas). Prenant notre courage et nos valises à  deux mains, nous avons vaillamment gravi la colline ; pour donner du courage à  chacun, j’ai même promis une surprise dés que l’on serait arrivé en haut.

Chose promise, chose due : la surprise était de taille. Colin répétait, en rigolant, que ce serait amusant que nous soyons logés dans les bà¢timents situés tout en bas. Lucie eut tout de suite moins le sourire quand nous avons appris que le Jameson Hall était en fait le lieu o๠se tiendrait la cérémonie d’ouverture, mais que nous étions effectivement logés dans les bà¢timents repérés par Colin.

C’est donc une fois arrivés en bas que j’ai donné ma vraie surprise à  tous, c’est-à -dire un exercice de combinatoire abordable (contrairement à  ceux que l’on avait déjà  vus).

Par la suite, nous avons fait la connaissance de Nhlakanipho, notre guide. Il est en troisième année de mathématiques à  l’université du Cap, et nous a donné des conseils quant à  l’installation dans les chambres et aux horaires des prochains jours. En outre, il en a profité pour nous faire faire un tour de l’université, nous montrant notamment les salles de sport qui feront office de salles d’examen mardi et mercredi.

L’aprés-midi s’est terminée de manière festive, avec … suspense insoutenable … des exercices de short list en combinatoire , géométrie , alg èbre et arithmétique .

Au milieu de celle-ci, alors que nous descendions dîner, nous avons appris que chacun était censé manger à  la cantine de son bà¢timent. Principe d’organisation respectable en soi mais inapplicable dès lors que l’on sépare les filles des garçons, en particulier pour Lucie qui était donc censée manger (matin, midi et soir) toute seule, ou tout du moins sans le reste de l’équipe. Heureusement, le personnel a été conciliant, et nous pourrons dorénavant prendre nos repas tous ensemble (du moins, on l’espère trés trés fort).

La journée s’est conclue par un tournoi de FIFA 13 (Real Madrid vs Real Madrid, histoire d’avoir une confrontation équilibrée) plus ou moins riche en buts, puis par un doux repos sur le coup de dix heures. Car demain, un petit-déjeuner nous attend vers 7 h 30 : et oui, même si la cérémonie d’ouverture n’est prévue qu’en début de soirée, autant s’habituer à  se coucher puis à  se lever tà´t !

OIM 2014 : Cérémonie d’ouverture (jour 5)

Aprés avoir travaillé assidà»ment ces derniers jours , l’équipe avait pour mission, aujourd’hui, de s’accorder un peu de repos. En effet, il n’est pire danger que d’arriver en compétition épuisé par l’entraînement, ou encore d’avoir pour idées fixes les ruses et outils mathématiques revus la veille. Il était donc décidé que l’on ne ferait pas de mathématiques aujourd’hui.

Le plus clair de la journée s’est donc passé dans une atmosphère de détente, autour d’une vidéo sympathique sur la place de l’atonalisme en musique (je vous recommande notamment le passage entre 11:30 et 16:00), de jeux vidéo et de jeux de cartes.

Puis nous sommes allés faire quelques emplettes, afin d’avoir à  boire et à  manger pendant les deux jours d’épreuves, si le besoin devait s’en faire sentir. Notons également qu’il faudra venir chaudement vétus, puisque le climat est bien un climat hivernal et que la salle de sport o๠les élèves travailleront est censée être modérément chauffée ces deux prochains jours.

Enfin, nous nous sommes rendus à  la cérémonie d’ouverture.

Celle-ci fut grandiose, avec une interprétation remarquable de l’hymne sud-africain (j’espère retrouver un jour le nom de l’artiste pour avoir ensuite la chance de l’entendre de nouveau), un spectacle de percussions certes bruyant mais diablement rythmé et entraînant, et les prestations aussi amusantes qu’impressionnantes d’une troupe de cirque . De surcroît, les pays passant en fonction de la date de leur première participation, la France était parmi les premiers appelés : assis au quatrième rang, nous avons pu récolter bon nombre des cadeaux et friandises que certaines équipes jetaient à  la salle.

Et c’est sur cette note positive que, aprés un dernier dîner ensemble et quelques bonnes paroles (« Ne vous fixez pas d’objectif chiffré qui pourrait vous faire stresser, la seule chose qui compte est de vous donner à  100 % ! »), chacun s’en est allé préparer ses affaires pour demain puis réciter ses tables de multiplication à  Morphée et Hypnos, histoire d’arriver frais et dispos pour la grande journée de demain !

OIM 2014 : Premier jour d’épreuves (jour 6)

L’avenir appartient à  ceux qui se sont couchés tà´t hier , car ils pourront se lever pour petit-déjeuner dès 7 h du matin puis marcher, entre 8 h 15 et 8 h 30, jusqu’à  la salle de sport qui tient lieu de salle d’examen.

La concentration était palpable même si chacun essayait de prendre avec philosophie la perspective de débuter sa première OIM, comme en témoignent les visages somme toute assez détendus.

Les problèmes de la journée ? De l’algèbre , de la combinatoire et de la géométrie .

Quatre heures trente plus tard, les impressions sont partagées : Lucie a résolu la majeure partie de l’exercice 1 ; Adrien et Julien l’ont résolu en entier ; Moà¯se et Elie ont résolu l’exercice 1 et une partie de l’exercice 2 ; enfin, Colin a résolu entièrement les exercices 1 et 2. Reste à  savoir ce que donneront concrètement ces impressions : quelques idées clé sont parfois cachées dans un brouillon, tandis qu’un raisonnement apparemment solide peut masquer, de manière heureusement assez rare, une faille qui fait s’écrouler tout l’édifice de la démonstration.

L’après-midi était alors entièrement consacré à  la décompression : il est difficile de s’extraire de l’épreuve et de ne pas la rejouer dans sa tête, mais il est important d’arriver frais mentalement et physiquement demain. Aussi la proposition, de la part de l’équipe Belge, de faire un match de football a-t-elle été joyeusement accueillie par certains, tandis que d’autres préféraient rester au calme ou ressentaient le besoin de se reposer.

Plus tard, après un dîner assez précoce, la soirée s’est fini par une partie d’escalier, une variante du jeu de l’ascenseur . En effet, autant joindre l’utile à  l’agréable : passer un moment de détente amusant et engranger plein de pensées festives qui occuperont sainement, en lieu et place d’une énième répétition des épreuves du matin, les rêves de chacun. Tout est bon pour arriver en plein forme demain matin !

OIM 2014 : Deuxième jour d’épreuves (jour 7)

Comme hier , chacun s’est levé aux aurores (certes tardives en ce début d’hiver) pour arriver déjà  bien réveillé à  la salle de sport, afin de commencer la deuxième journée d’épreuves.

Aujourd’hui, on a eu droit à  de la géométrie , de la combinatoire et de la combinatoire. Plus exactement, le problème 5 (c’est-à -dire le deuxième problème de ce jour) avait été vendu comme de l’arithmétique, mais les élèves cherchent encore pourquoi.

à€ l’arrivée, Moà¯se, Colin, Adrien et Elie ont réussi l’exercice 4 et obtenu quelques résultats sur l’exercice 5 ; Julien a réussi l’exercice 4 ; enfin, Lucie a encore joué de malchance et n’a obtenu que quelques résultats partiels sur l’exercice 4.

C’est également à  la sortie des épreuves que nous avons rencontré Pierre, notre cher team leader, qui avait déjà  obtenu et commencé à  lire les solutions du premier jour. Nous avons alors immédiatement décidé que nulle information ne filtrerait sur notre opinion des copies et nos projections de scores et de médailles ; ceci dans le but de pousser les élèves à  profiter des visites touristiques qui leur seront désormais proposées plutà´t que de se morfondre à  espérer que la barre de la médaille de bronze soit à  x points plutà´t qu’à  x+1 points.

Pierre et moi nous sommes donc enfermés dans nos chambres respectives pour lire les solutions proposées par nos élèves : j’ai eu la charge des problèmes 2, 3, 5 et 6, sur lesquels nos élèves avaient a priori le moins de résultats (et o๠le but est donc essentiellement de voir quels points ils auraient pu obtenir), tandis que Pierre s’est occupé des problèmes 1 et 4, o๠il est davantage question de vérifier l’absence d’erreur grave, afin que nul ne perde de points.

Après cette lecture captivante qui a occupé gaiement la majorité de ma soirée, je suis finalement revenu voir quelques élèves pour assister à  la fin de la demi-finale de coupe du Monde de football entre l’Argentine et les Pays-Bas : les élèves de l’équipe argentine auront manifestement le sourire aux lèvres en se réveillant demain.

La chronique de l’OIM 2012 en Argentine par deux participants français

Par Cyril Letrouit et Séginus Mowlawi

AVANT l’IMO (4 au 8 juillet) (par Cyril Letrouit)

à‡a y est, c’est le grand jour, nous partons ! Le voyage devrait durer plus d’une journée : après une ou deux heures passées dans les transports pour rejoindre l’aéroport de Roissy, depuis Paris (ou sa banlieue), Genève ou Lyon, nous enchaînerons 13 heures 30 d’avion (Paris-Buenos-Aires), avant de prendre un car pendant un peu plus de 6 heures (Buenos-Aires-Mar del Plata) et enfin un taxi pour nous déposer devant l’hà´tel. Toutefois, Claude Deschamps, notre chef de délégation, et Pierre Bornsztein, notre chef de délégation adjoint ont été prévoyants : ils ont avancé notre départ de quelques jours (nous partons le 4 juillet à  23 heures 30 au lieu de partir le 8 juillet) pour que nous soyons en forme au moment des épreuves.
Nous voici donc à  l’aéroport, tous réunis autour d’un jeu de cartes, à  l’exception de Claude qui, quant à  lui, a déjà  rallié Mar del Plata, faisant partie du jury sélectionnant les problèmes. Le système nerveux de Pierre est mis deux fois à  l’épreuve : la première fois, lorsque j’annonce qu’il ne reste qu’un peu moins de trois mois de validité à  mon passeport ; la deuxième lorsque Seginus explique que ses bagages ont été enregistrés dès son départ de Genève, et qu’Air France est donc en charge de les faire transiter entre les avions Genève –Paris et Paris – Buenos-Aires…

Mais bon, oublions tout cela : à  minuit, l’avion décolle. A quelques sièges de nous sont installés les membres de l’équipe russe, que nous avons rencontrée dans l’aéroport. Quelque chose m’étonne : ils ne font pas de maths. Et même, ils semblent tous captivés par leur petit téléviseur individuel. Comme quoi, finalement, l’équipe française et l’équipe russe se ressemblent beaucoup. Je ne saurai dire ce que nous avons fait pendant le voyage : ce fut un mélange de sommeil léger, de bouts de films regardés, de repas avalés sans vraiment s’en apercevoir, tant un mutisme dà» à  la fatigue s’était emparé de nous… Lorsque l’avion se pose, il est 7 heures du matin à  Buenos-Aires. Pendant que Pierre s’occupe de prendre les billets de bus, nous discutons avec l’équipe italienne, que nous avons reconnue dans l’aéroport car nous en connaissons certains membres qui étaient à  Grésillon avec nous.

Bientà´t, rebelote : nous voilà  dans le bus. Là , pas la peine d’essayer de dormir, c’est mission impossible. Alors nous enchaînons parties de cartes sur parties de cartes, puis exos de maths sur exos de maths (là , j’exagère peut-être un peu), avec tout de même un arrêt dans un restaurant, o๠tous nous nous accordons pour ne pas tester de spécialités locales (nous ne tenons pas spécialement à  être malades). Et bientà´t, Mar del Plata surgit devant nous… Le car s’arrête au cÅ“ur de la ville, nous attrapons un taxi (ou plutà´t trois taxis, parce que leurs taxis sont vraiment petits et nos valises sont vraiment grosses)… Il faut savoir que, comme Louise en a fait l’expérience, les chauffeurs de taxis demandent à  leurs passagers de ne pas mettre leur ceinture. De plus, à  titre de comparaison, leur conduite ressemble un peu à  celle que l’on adopte dans les jeux vidéo de course poursuite. Après avoir écrasé trois personnes (non, là , c’est une blague), nous arrivons sains et saufs à  l’hà´tel. C’est un hà´tel provisoire, qui n’est pas celui de l’Olympiade, mais qui nous convient bien : pour le moment, nous ne demandons qu’une chose : dormir !

Pendant trois jours, nous tentons de nous adapter au décalage horaire, et nous dormons beaucoup pour être moins fatigués. Nous travaillons un peu, et Pierre nous donne ses conseils, notamment pour la combinatoire, le domaine qui, semble-t-il, n’est pas le préféré de la plupart des membres de l’équipe.

Un formidable souvenir nous reste à  tous de ces trois jours là Â : un midi, nous décidons d’aller au restaurant. Après quelques minutes, nous entrons dans un petit resto qui propose une «Â parillada  » pour huit. C’est un plat local constitué de toutes les viandes que l’on peut imaginer, servies sur un petit grill. Cela nous semble fort appétissant, et effectivement, nous trouvons les saucisses et le poulet assez bons… Mais les abats et autres morceaux qui ressemblent plus à  des tuyaux qu’à  de la viande (non seulement par leur aspect, mais aussi par leur goà»t) nous font comprendre pourquoi la gastronomie française est plus réputée que la gastronomie argentine. Par chance, personne ne tombe malade.

Le dimanche 8 juillet, accompagnés de notre très sympathique guide Mélanie, avec laquelle nous avons fait connaissance, nous rejoignons le bà¢timent de l’Olympiade : c’est un immense hà´tel cinq étoiles. A l’entrée, un homme avec un grand chapeau nous convie à  pénétrer dans le hall : sur les murs sont accrochés d’immenses peintures, sur les cà´tés partent d’immenses escaliers, et au milieu trà´ne une immense table. Grandiose ! Nous sommes répartis dans quatre chambres : Arthur avec Michel, Louise avec une Finlandaise, Matthieu avec un Ivoirien, et Seginus avec moi.
C’est ce jour-là  que nous avons reçu les cadeaux offerts par l’Olympiade à  chaque participant : un sac, un parapluie et… un bonnet et une polaire. Le comité d’organisation a voulu nous rappeler que c’est seulement la troisième fois de son histoire que l’Olympiade se déroule dans l’hémisphère Sud, et donc en hiver.

C’est également ce jour-là  que nous découvrons la grande, la géante, l’immense salle de jeux de l’hà´tel, o๠sont mis à  disposition tables de ping-pong, des Wii, des jeux vidéo, des ordinateurs, des babyfoots,… Il y a bien de quoi s’occuper une journée !

LUNDI 9 (par Cyril)

Cette matinée du lundi 9 juillet constitue le coup d’envoi officiel de l’Olympiade. Après un solide petit déjeuner, les équipes des cent pays se rejoignent dans l’immense salle de jeux de l’hà´tel, de laquelle se dégage un brouhaha sans pareil. Bientà´t, l’une des portes s’ouvre, et les équipes, une à  une, se retrouvent à  l’air libre. Les six cent corps entremêlés dans la salle de jeux forment bientà´t une longue et large colonne qui s’étire sur plusieurs centaines de mètres. à‡a et là  s’agitent les pancartes de quelques pays, ici quelques personnes arborent fièrement leur drapeau ; sur tout le cortège règne une ambiance festive, entretenue par quelques organisateurs montés sur des échasses assorties de ressorts qui, tout en bondissant, font vaciller dans le ciel bleu les drapeaux de l’Olympiade.

Devant notre cortège, les membres d’un orchestre, tous vêtus en rouge et or, entonnent des marches, accompagnés de danseurs. Nous traversons plusieurs routes, coupant pour un temps la circulation ; les passants regardent, étonnés, notre parade s’enfoncer dans le centre-ville. Parfois, nous entendons un «Â Ah ! Francia !  », auquel nous répondons, non sans fierté, en exhibant notre drapeau.

Au bout d’une petite demi-heure, à  hauteur du théà¢tre de la ville, la procession s’arrête, sans que, pour autant, les musiciens ne cessent de jouer. Pendant cette pause, certains pays se prêtent au jeu d’élever le plus haut possible leur pancarte. Malheureusement pour eux, la France décide bientà´t de montrer ses compétences dans ce genre de défi et, du haut de mes deux mètres, je brandis bientà´t la pancarte plus haut que tous ! Ouf ! Pendant l’IMO, nous aurons au moins gagné cette compétition !

Après ces futilités et quelques photos avec d’autres équipes, comme celle d’Irlande, nous entrons dans le théà¢tre, et nous installons dans le parterre. Les chefs de délégation, et notamment Claude, font bientà´t leur apparition au premier balcon. Mais déjà , Louise, Seginus et Pierre se sont lancés un défi : rencontrer la quasi-totalité des chefs de délégation adjoints de tous les pays pour échanger avec eux les énoncés des problèmes posés dans les compétitions mathématiques de leurs pays respectifs et aussi quelques cadeaux, si cadeaux il y a…

Les lumières s’éteignent bientà´t, et, sur scène, se succèdent quelques éminentes personnalités argentines ou non, ayant participé à  l’organisation de la compétition. Toujours, une traductrice hispano-anglaise les accompagne, donnant un aspect assez cocasse à  ces discours, puisque les hispanophones n’en saisissent pas le sens en même temps que les anglophones… et ceux qui ont appris les deux langues peuvent, quant à  eux, tenter de compléter ce qu’ils n’ont pas compris dans l’une d’elles par l’écoute de la traduction.

Ensuite, nous passons à  l’hymne de l’Olympiade Internationale, et là , les réjouissances commencent : les non-hispanophones, comme Seginus ou moi, ne peuvent s’empêcher devant la facilité à  en comprendre le sens : «Â Sumamos, multiplicamos  » ou encore «Â los problemas  ». à‡a y est, pensons-nous, nous sommes devenus bilingues en un clin d’Å“il !

Puis, le défilé des équipes sur la scène commence. Toutes tentent de se distinguer des autres par leur originalité : l’équipe roumaine s’est fait confectionner de magnifiques maillots jaunes o๠sont inscrits leurs noms, au dos. L’équipe mexicaine arbore, quant à  elle, des sombreros magnifiques ; les Allemands lancent vers le public en liesse des paquets de Haribo ; l’équipe Australienne nous mitraille de mini koalas en peluche ; la Nouvelle-Zélande tente de nous assassiner avec des stylos… Et nous, Français, défilons, derrière notre drapeau, deux personnes en bleu, deux en blanc, deux en rouge…

Lorsque les cent équipes sont passées, la cérémonie reprend son cours avec une magnifique démonstration de danses argentines, notamment de tango, et se termine par l’allumage d’un canon lanceur-de-bouts-de-papier qui donne un aspect féérique à  la salle.

Mais, le retour à  l’hà´tel est beaucoup plus calme, car déjà  plane, dans tous les esprits, le premier test du lendemain…

MARDI 10 (par Seginus Mowlavi)

à‡a y est, le grand jour est arrivé… Heureusement on a à  peu près tous bien dormi (si ce n’est les difficultés habituelles du réveil).

Après le petit déjeuner, on entre dans la salle de l’examen, vers 8 heures et demie ; dans la foule qui s’amasse à  l’entrée, certaines équipes font un haka façon All-Blacks, mais de toute façon l’esprit n’est pas autant à  se laisser intimider par les équipes qu’à  penser à  ce qui va tomber dans une demi-heure… Une fois installés, il reste 20 bonnes minutes sur la chaise pour bien déguster l’angoisse pré-examen.

A l’heure fatidique, une sonnerie suivie du bruit de toutes les enveloppes d’énoncés qui s’ouvrent avertissent que le test vient de commencer. S’en suivent 4 heures et demie de joie, déceptions (tiens, une erreur de signe…), espoir entrecoupés de quelques pauses aux WC pour démêler le brouillis que la combinatoire a créé dans le cerveau ; en tous cas les exercices n’ont pas laissé l’occasion de s’ennuyer.

Débriefing avec Pierre après le test : l’exercice 1 a été fait par tout le monde, sauf Arthur qui a heureusement réussi le 2 : tout va bien, jusque là  le contrat d’un exercice par jour et par élève est rempli. Par contre, la déception s’installe quand les 2 qui ont réussi l’exercice 2 racontent la solution (qui tient en quelques lignes) aux 4 autres ; comme quoi, les olympiades sont là  pour rappeler qu’une solution élémentaire n’est pas pour autant facile à  trouver… Comme ce n’est pas une bonne idée de passer le reste de la journée avec des têtes d’enterrement, la belle percée de Matthieu et Arthur sur l’exercice 3a remet un peu de lumière au tableau.

L’après-midi, on profite de la salle de jeux pour décompresser un peu et penser à  autres choses que des maths. Au programme, ce sont donc le Babylone, Set, Jenga et babyfoot. Evidemment, les 550 participants de l’IMO ont le même programme, ce qui rend les tables de ping-pong (un des coins les plus actifs de l’hà´tel) inaccessible ; ce n’est pas un souci pour nous qui cherchons juste une occasion de bouger, il reste la salle secrète du deuxième étage… On y retrouve les coussins de la veille, ainsi qu’une prise qui permet d’installer l’ordinateur de Louise, indispensable à  la tournée des mails envoyés aux parents et à  Bodo. Malheureusement, alors qu’on est en train de se reposer sur les coussins après une petite bataille (eh oui, en plus d’obus, ils servent aussi accessoirement de fauteuils !), quelques organisateurs viennent nous chasser de la salle qui est en fait interdite. Dommage…

Le soir, on ne traîne pas trop, car il reste la moitié de l’examen à  passer, et certains ont une féroce envie de venger l’exercice 2 raté.

MERCREDI 11 (par Cyril)

Rebelote… 8h30, assis sur ma chaise, j’attends. A ma droite, une sympathique colombienne ; à  ma gauche, un indien, très concentré ; devant et derrière moi, un norvégien et un suédois, je crois… Sur ma table trà´nent quelques paquets de biscuits, une bouteille d’eau, et une pleine bouteille d’un liquide noir : du café ! Rappelons-nous la phrase du mathématicien hongrois Alfred Renyi :  «Â un mathématicien est une machine à  transformer le café en théorème  »â€¦ Trêve de plaisanterie, il est neuf heures, la sonnerie a retenti ! J’ouvre l’enveloppe posée sur ma table. Equation fonctionnelle en 4, géométrie en 5, arithmétique en 6… ça me plaît bien ! Bon, au boulot… Voyons un peu ce que c’est que cette équation fonctionnelle (rappelons-nous que commencer par l’exercice 4 est l’un des conseils que nous recevons avant la compétition). On teste quelques petites valeurs… ça ne donne pas grand-chose… Peut-être que l’on va regarder quelles sont les fonctions faciles à  trouver qui en sont solution… Ce n’est pas si facile… Que faire ? Certainement existe-t-il une astuce que je n’ai pas vue… Il devrait être rapide, c’est un exercice 4… Qu’est-ce que je connais comme astuce en équations fonctionnelles ? Symétriser, mais c’est déjà  symétrique… Regarder si c’est possible qu’il existe plusieurs solutions à  cette équation ? Apparemment, c’est possible…

Pendant longtemps, j’essaie de trouver une astuce, qui viendrait rapidement à  bout du problème. Imaginez-vous à  quel point l’on se sent seul dans ce genre de moments… Même la sympathique colombienne à  ma droite ne me donne pas d’inspiration… Le temps tourne, je suis toujours sur l’exercice 4, ce n’est pas bien… Il ne me reste bientà´t plus qu’une possibilité : trouver une solution pas jolie du tout, en différenciant beaucoup de cas. Et là  (oh miracle !), en à  peine six pages (!), ça marche ! Quelques relectures s’imposent, qui atténuent encore le peu d’espoir qu’il me restait de faire un deuxième exercice… Mais, tout de même, essayons un peu cet exercice 5, voyons s’il n’est pas un peu plus rapide ! Un triangle rectangle, une égalité de longueur à  prouver. Hum ! Je n’ai pas trop le temps de réfléchir, voyons tout de suite ce que donne un calcul analytique. Dans ce calcul, tout commence bien, on peut poser un joli repère orthonormé, mais, à  un moment, on tombe sur une équation du second degré, parce que certains points ne sont pas déterminés uniquement (et c’est là  la clé du problème, comme je l’apprendrai plus tard…). La voie analytique semble donc être une impasse… Comment faire ? Je passe à  l’exercice 6, qui m’a l’air très joli. 5 minutes plus tard, la cloche retentit : c’est terminé !

Je range mes affaires et sors de la salle, désespéré. Peut-être que les autres membres de l’équipe ont fait mieux ? Je les retrouve tous avec Pierre et Claude dans le hall adjacent aux salles d’examen. Nous comparons nos solutions pour l’exercice 4, et là , stupeur ! Nous avons trois versions différentes du résultat qu’il fallait trouver ! Il s’avèrera finalement que trois d’entre nous ont oublié un petit cas, dans cette énervante équation fonctionnelle… Toutefois, quasiment chacun de nous annonce avoir quelques petits résultats partiels dans le 5 ou le 6. Qui sait, cela permettra peut-être de pallier la déconvenue de l’exo 4…

Toutefois, pour l’ensemble de l’Olympiade, il apparaîtra plus tard que le deuxième test était plus dur que le premier, non par la difficulté des exercices, mais par leur aspect chronophage. En effet, le 6 comme le 4 admettent des solutions longues et avec de nombreux cas à  distinguer, auxquels on ne peut pas, semble-t-il, échapper.

Mais oublions tout cela : le plus dur est passé, et désormais, que la fête commence ! Un rodéo est installé dans la salle de jeu, c’est-à -dire une vache en plastique mouvante à  laquelle les courageux candidats tentent de rester accrochés le plus longtemps possible. Un cirque a été invité, pour faire oublier à  tous le test de la matinée, et pour que désormais, nous puissions, à  loisir, nous concentrer sur des exercices de jonglage.

Les fans de jeux vidéos se ruent vers les écrans installés sur un mur de la salle de jeux, certains attendent qu’une place d’ordinateur se libèrent, d’autres encore s’entraînent sur le circuit de voitures électriques, entament des parties de set, de babyfoot, de ping-pong, de billard, de jenga ou d’échecs… Il y en a pour tout le monde, d’autant plus que l’Olympiade a mis à  disposition de tous les amateurs de défis un puzzle de 24.000 pièces (qui, signalons-le, restera inachevé, puisqu’il restait encore bon nombre de pièces à  placer lorsque l’Olympiade se termina). Petit détail qui peut avoir son importance : un taà¯wanais a préféré, quant à  lui, à  tous les autres jeux proposés, relever le défi – non moins spectaculaire – d’apprendre la totalité des chiffres de 2012 factoriel…

Notre équipe se prépare quant à  elle à  un petit poker, qui commence après le dîner. Nous y avons invité l’équipe luxembourgeoise, et avons donc retrouvé Victor. Ce n’est qu’à  quatre heures du matin que cette mémorable partie prendra fin…

JEUDI 12 (par Seginus)

Aujourd’hui, première journée entière de vacances !

Bon, le programme reste connu : quelques jeux de cartes, ping-pong, jeux de société, babyfoot, quelques essais au rodéo, joie et frustration au jonglage… Matthieu s’essaie entre autres au laser : un petit coin de la salle est dissimulé sous des rideaux noirs opaques, et à  l’entrée dans ce coin un des guides répand de la fumée, ce qui révèle une « forêt » de lasers traversant toute la salle. L’objectif est de traverser cette forêt sans se faire toucher pour arriver à  l’autre bout, o๠la récompense (un T-shirt IMO) attend. Avec quelques essais on y arrive, mais il faut avouer que c’est plus facile avec les conseils de Matthieu, qui est le premier à  le remporter.

L’interdiction des coussins est palliée par le tournoi de beach soccer : Victor, Michel, Matthieu, quelques lettons et moi formons une équipe. C’est une expérience plutà´t inhabituelle : les joueurs et le ballon ont un comportement assez différent selon qu’ils sont sur du sable (mi sec mi mouillé, assez ferme mais avec des creux et bosses). Enfin bon, malgré l’élimination directe on a pu bien profiter de l’air frais de l’Argentine en juillet.

En fin d’après-midi, un cours de tango est organisé ; et pour ceux qui n’aiment pas la danse, une sortie à  la patinoire est aussi proposée. C’est ainsi que toute l’équipe française se retrouve dans le groupe patinoire (personnellement le tango n’est pas vraiment ce qui m’intéresse le plus…). Après un petit trajet à  pied dans le centre-ville, j’ai la surprise de voir les guides entrer dans un petit bar caché entre les boutiques (peut-être qu’un Parisien ne serait pas surpris, mais en temps que Genevois j’ai plutà´t l’habitude de voir des patinoires en extérieur ou en gymnase). Bref on découvre une minuscule surface glacée au fond du local. Evidemment comme on ne peut pas patiner tous en même temps (le nombre de personnes autorisées à  la fois est déjà  remarquablement élevé pour la surface disponible), l’attente est plutà´t longue, mais Victor vient à  notre rescousse avec son app Set sur l’iPhone. Une fois les patins chaussés, on se retrouve à  slalomer entre les autres patineurs, mais (en dépit de ce que j’avais pensé en voyant le lieu) on passe du bon temps. Malgré une chenille qui a fini par s’écrouler façon dominos (c’était inévitable…), on ressort sains et saufs, ce qui n’est pas le cas de tout le monde (en particulier d’un guide).

Cette sortie a également été l’occasion de faire un peu plus connaissance avec les Luxembourgeois, qui sont aussi venus.

Le soir, l’humeur n’est évidemment pas à  se coucher tà´t, mais on est quand même légèrement plus raisonnables qu’en temps de poker (ce qui, après tout, ne veut rien dire).

VENDREDI 13 (par Cyril)

Les organisateurs de l’Olympiade ont prévu aujourd’hui, pour tout le monde, une sortie à  l’aquarium de Mar del Plata. Une petite demi-heure de car et nous y sommes. A notre grande surprise, l’aquarium est en réalité un parc aquatique en plein air, à  deux pas de l’Océan. Magnifique ! Nous rencontrons dans la matinée un pingouin tout à  fait extraordinaire, deux fois plus gros que tous les autres, et aux poils marrons… qui est, comme on nous l’explique, un bébé qui n’a pas encore eu le temps de faire ses plumes et est donc recouvert, pour le moment, d’une épaisse touffe de poils.

Puis c’est l’heure du repas : toute l’Olympiade se réunit dans le restaurant, dans lequel, en attendant nos repas, nous jouons à  la coinche, LE jeu des participants français à  l’Olympiade. C’est une variante de la belote, o๠seules la distribution des cartes et la détermination de l’atout changent.

Après le déjeuner, nous sommes conviés à  assister à  un spectacle de dauphins, qui se propulsent en l’air à  une hauteur impressionnante, ou encore permettent aux dresseurs de se mettre debout sur leur dos, puis leur font ainsi parcourir, comme montés sur une planche de surf, avec une étonnante aisance, le bassin de long en large. Nous partons bientà´t pour un autre spectacle, celui des otaries, qui multiplient les tours de passe-passe avec les ballons ou applaudissent le public.

Mais la pluie rompt soudain le cours tranquille de notre journée, tout d’abord sous la forme de fines gouttelettes, qui se transforment peu à  peu en véritables gouttes, avant de devenir, comme Arthur le dit si bien, des hyper-gouttes, ou gouttes 4 dimensionnelles. Nous sommes trempés de la tête au pied, mais, courageux, nous attendons sagement dix-huit heures sous une tonnelle, avant de nous ruer en grand désordre sous le déluge. Vision apocalyptique, horreur cataclysmique, foudre transcendante ! Et là , dans le brouillard épais, par-dessus les verres trempés de nos lunettes, que vîmes-nous ? L’arche de Noé salvateur, l’abri salutaire, le paradis terrestre… Et oui, c’étaient bien eux… Nos cars se dressaient, majestueux, en haut d’une petite butte…

A l’hà´tel, dans la soirée, les quelques notes manquantes de nos tests sont affichées. Seginus obtient 21, Louise égale le score de l’un des chinois avec 18, puis Cyril, Matthieu et Michel obtiennent respectivement 15, 14 et 11. Arthur, quant à  lui, a, pour le moment, un total de 13, mais celui-ci sera augmenté d’un point le lendemain. Une part du suspense est ainsi levée, mais les barres des médailles, encore inconnues, laissent un flou partiel planer dans nos esprits…

SAMEDI 14 : [Par Cyril Letrouit]

Après une matinée passée au calme, dans la chaleur de la salle de jeu, nous décidons, au moment du thé de quatre heures, de faire savoir à  tous qu’aujourd’hui est le jour de la fête nationale française… C’est pourquoi, après nous être installé au beau milieu de la salle de thé – qui, soit dit en passant, est aussi celle o๠nous avons passé les tests -, nous entonnons tous les six, en cÅ“ur, la Marseillaise. Bien que nous ne chantions pas parfaitement juste – c’est une litote -, on peut dire que nous avons été tout de même couverts d’un tonnerre d’applaudissements à  la fin de notre prestation…

La fin de cette après-midi fut consacrée à  une visite de la ville de Mar del Plata, en compagnie de notre guide, Mélanie : nous passons devant l’église, rentrons dans quelques boutiques, et gagnons bientà´t le bord de mer o๠nous jouons au jeu de celui qui s’approche le plus du rivage. Matthieu et Louise l’emportent haut-la-main, puisqu’ils finissent trempés par une vague plus importante que les autres.
De retour à  l’hà´tel, deux journalistes argentins nous interviewent pendant quelques minutes pour savoir nos impressions sur la compétition. Les trois hispanophones de notre équipe se font un plaisir de parler espagnol, pendant que les trois germanophones, paresseux, font appel à  notre guide-traductrice.

Dans la soirée, un grand maître des échecs vient animer la salle de jeux. Entre vingt heures et minuit, disputant treize parties en même temps contre différents concurrents de l’OIM, il parvient à  toutes les gagner, à  l’exception de deux ou trois matchs nuls. Impressionnant !

DIMANCHE 15, LUNDI 16 (sans transition : le départ étant lundi à  6h45, cela ne valait pas la peine de dormir pour se réveiller encore plus fatigué) : (par Seginus)

Ce matin, on nous avertit qu’une photo de groupe aura lieu, et que par conséquent il faudra être sur le lieu de la photo une demi-heure avant. C’est en arrivant là  qu’on découvre tout le sens de « une demi-heure avant » : le temps que tout le monde (c’est-à -dire quasiment un millier de personnes) arrive, sache o๠aller, s’installe, fasse de la places aux équipes qui arrivent de chaque cà´té… trois quarts d’heures sont facilement passés. Bref un petit sourire, la photo est prise en deux minutes (il faut quand même virer le chien qui posait en plein milieu). Petit détail sur le chemin du retour, on aperçoit les tables qui se font enlever de la salle d’examen au premier étage : une personne à  l’intérieur fait sortir la table par la fenêtre et la passe à  une deuxième qui est sur le toit d’une camionnette, qui la passe à  une troisième en bas qui la range dans la camionnette. A répéter 550 fois…

La matinée étant libre, on reste dans une chambre pour jouer aux cartes. Un téléphone vibre, texto de Pierre… qui annonce les barres de médailles : bronze 14, argent 21 et or 28. YEEEEEEEEEEEEES ! Allégresse générale, ce sont les po, polopopopo, pooo qui fusent, on s’embrasse, on se serre la main… (en effet : deux ont eu 14, un 15 et un 21 . en gros les deux tiers de l’équipe n’était pas surs de leur médaille). Une belle information qui arrive au bon moment de la journée, pour nous mettre en forme !

La cérémonie de clà´ture a lieu en début d’après-midi. Contrairement à  la cérémonie d’ouverture, elle se passe dans un théà¢tre juste à  cà´té de l’hà´tel (il n’y a donc pas la parade géante).

Dans la salle, chacun s’asseoit sur son siège (on est répartis en fonction des points, pour une meilleure organisation). On a droit aux discours habituels, en espagnol et en anglais, aussi à  l’hymne national argentin o๠on se tient debout devant l’image vidéo-projetée du drapeau argentin qui vole au vent… On a aussi eu quelques danses, et le fameux hymne « sumamos multiplicamos ».

Finalement les médaillés sont appelés, par ordre croissant de points. Petit détail, on n’a pris qu’un drapeau (erreur logistique d’origine humaine), et c’est ainsi qu’un drapeau français s’est retrouvé à  voler par-dessus trois rangées en plein milieu de la remise. Tout se passe bien, personne ne trébuche dans les fils des micros. A la fin, contrairement à  l’année dernière, ils n’ont pas mentionné le fait que le hall of fame a trouvé un nouveau premier : Theodor Von Burg s’est donc retrouvé au milieu d’autres médaillés d’or. Par contre Jeck Lim (le Singapourien qui a eu 42) a pu monter seul sur scène, o๠il a reçu une standing ovation (il ne l’avait pas volée…).

Finalement, on sort de la salle pour retrouver Pierre et Claude à  l’entrée du théà¢tre ; Claude en profite pour nous « rappeler quelques conseils afin de ne pas reproduire le ratage du 5.

A la sortie, on fait quelques photos avec les équipes anglaise et argentine.

L’après-midi est libre, et on en profite pour aller acheter un cadeau à  Mélanie. Petit problème, on ne peut sortir qu’accompagnés d’elle. On monte donc un plan, qui consiste à  sortir avec les Luxembourgeois et leur guide Caroline, et à  se séparer à  un moment : Français et Caroline d’un cà´té, Luxembourgeois et Mélanie de l’autre. Bon, tout ne se déroule pas exactement comme prévu, mais l’improvisation n’est pas grande et on réussit à  ramener une peluche de coccinelle (adorable !) incognito.

Le soir, le repas est dans la salle de l’examen, réaménagé en salle de gala (les tables rondes avec le pot de fleur et les trois paires de couverts par assiette, façon banquet de mariage). A notre table, o๠les huit français sont réunis, il y a aussi les leaders italien et luxembourgeois qui discutent avec Claude

C’est à  ce moment qu’est remis le « microphone d’or » : c’est un trophée remis au leader qui a pris le plus de fois la parole lors des réunions de jury ; il est décerné au chef israélien (précisons que c’est Claude qui a fait la traduction française).

Un autre événement a lieu, c’est la finale du concours de talents (comme « Britain’s got talent »). On voit donc notamment un garçon jouer du piano avec les pieds derrière la tête et une fille à  la voix magnifique chanter une chanson . Sans surprise (il fallait être là  pour voir…) c’est la fille qui chante qui remporte le prix (précisons que c’est Mélanie qui a fait la porte-parole du jury du concours).

Pendant une pause entre deux plats, on décide de donner la coccinelle à  Mélanie : elle est très émue (et nous aussi), a l’air d’adorer cette peluche « chou comme tout » et vient tous nous embrasser.

Après ceci, un groupe de musique vient jouer du bruit assourdissant (d’autant plus qu’on avait un haut-parleur à  proximité), ce qui nous fait quitter la salle sans rancune dès le repas terminé (même si le tout s’est réaménagé en salle de danse).

Comme il a été précisé, vu l’heure de départ le lendemain, on décide de faire une nuit blanche. A ce qu’on voit, on n’est pas la seule équipe à  avoir fait cette décision : la salle de jeux est bondée. A un moment, moi et quelques anciens « grésillonneurs » décidons de faire une chenille dans la salle. (rappel pour ce qui ne connaissent pas le principe : on se place en ligne, les uns derrière les autres, en se tenant les épaules ; tout le monde a les yeux fermés, sauf le dernier, qui doit faire avancer la chenille et la diriger en transmettant des ordres sous formes de tapes sur l’épaule de celui de devant ; par une récurrence facile, le premier reçoit les ordres et les applique, la chenille entière suivant le premier. comme vous pouvez le deviner, une chenille de plus en plus longue peut aboutir à  des situations cocasses…). Comme c’est une activité plutà´t méconnue du grand public (= ceux qui ne sont pas venus à  Grésillon), les autres participants regardent la chenille avec de drà´le d’yeux, parfois s’interposant en plein chemin… peu à  peu, les plus curieux demandent à  participer, et c’est ainsi que la chenille atteint rapidement une taille monstre (ingérable : pour avoir été le dernier, je peux dire que les ordres, en plus de ne pas toujours passer, se transforment parfois en l’ordre contraire). On se casse alors en plusieurs chenilles, le but étant de « couper » les chenilles adverses ; à  cause des murs, poteaux et du mini escalier, on aboli la règle dite « de la torpille » qui veut qu’un ordre permette au premier de courir tout droit (les yeux toujours fermés) jusqu’à  ce qu’il rencontre un obstacle (si le dernier a bien calculé son coup, l’obstacle devrait être une chenille : sinon, eh bien….). Bref à  un moment on en a marre des chenilles, et on change de jeux : on se met en cercle (en tenant la main des voisins), et on s’emmêle (sans là¢cher les mains : c’est la seule règle) ; une personne extérieur doit démêler le tout.

Finalement cette soirée, grà¢ce à  ces jeux (en plus d’un Mao fait avec les Anglais qui, en passant, on un accent magnifique), permet de terminer l’IMO en beauté.

Car il est bientà´t 6h45, et il faut partir…

On rassemble les affaires, descend les valises, et nous voilà  dans le car avec d’autres participants. On échange quelques derniers coucous par la fenêtre avec Mélanie. Le voyage en bus se passe essentiellement au pays des songes, avec quelques instants de réveil dans une chaleur étouffante.

Une fois à  l’aéroport, on descend au terminal C. Petite check-list devant les comptoirs : valise, oui ; sac à  dos, non. Tiens donc, c’est plutà´t embêtant ça… d’autant plus que le passeport est dedans ! Ni une, ni deux, je cours à  l’extérieur (accompagné par Matthieu) pour voir que le bus est parti ; je garde l’espoir, suis la route, débarque sur un parking, toujours pas de bus ; passe un bà¢timent, toujours pas ; je commence à  perdre l’espoir (je ne retranscrirai pas les jurons) quand je vois une petite voie, que je suspecte vaine ; mais bon, je n’ai rien à  perdre… Miracle ! IL est là , devant le terminal A ! J’entre dans le bus, le chauffeur me tend un sac en me demandant si je venais le chercher : tout va bien !

Le reste du voyage (toujours dans le B777, 13h de vol = 4 films et un peu de sommeil) se déroule sans anicroche jusqu’à  Paris, o๠certains parents attendent.

C’est déjà  fini !

Remerciements

Aux organisateurs de l’IMO pour ces dix jours extraordinaires ;

A Pierre Bornsztein et Claude Deschamps pour nous avoir encadré et défendu avec courage nos copies ;

A Mélanie Sclar, notre guide vraiment très sympathique et serviable ;

A Bodo Lass et Theresia Eisenkà¶lbl, pour les cours qu’ils nous ont dispensé pendant toute l’année au club de mathématiques discrètes à  Lyon, et qui nous ont été d’une très grande utilité pour la sélection puis l’épreuve ;

A l’association Animath et à  son président Martin Andler pour leur soutien dans la préparation de l’équipe française à  l’Olympiade Internationale ;

A tous les volontaires qui ont animé les cours de Grésillon (et rédigé son polycopié), les stages de l’OFM, et ont corrigé nos copies de tests et d’envois ;